Des mots qui nous donnent la pêche…
Ecoutons les éducatrices et éducateurs
Carine nous raconte :
Témoins d’une autre époque et garants d’un savoir abyssal vous êtes comme un phare qui illumine le cœur des petits comme des grands et qui nous guide par-delà les années !
Humilité, partage, respect et bienveillance sont vos maîtres mots ! Merci à vous de nous avoir permis de découvrir cet univers magique qu’est la mer et cette grande famille qu’est Grand Largue ! Merci encore de partager cette passion et de transmettre des valeurs parfois oubliées. Sachez que petits et grands se remémorent chaque moment de nos opérations passées, un sourire, une parole, un souvenir, un récit, une histoire qui réchauffent les cœurs et permet d’avancer !
En 30 ans combien de têtes brunes, blondes, rousses sont passées entre vos mains, des milliers peut-être qui garderont dans leurs escarcelles de jeunes devenus grands des bribes de chacun d’entre vous, des Christian, des Jean, des Gérald, des JP, des Bernard, des Philippe, des Mouna, des Hervé, des Eric, des Alain, des François, des Jacques, des Yves, des Guy, des Marion, des Colette, des Marie-Christine, des Claude, et tant d’autres pour lesquels nous avons toujours une pensée, tellement nombreux que nous ne pouvons tous les nommer. Ils transmettront vos paroles, vos souvenirs encore et encore par-delà les années et expliqueront comment tous ces matelots bienveillants ont transformé leurs petits cœurs endoloris par de lourdes histoires de vie !
Merci encore et continuez ainsi à donner du sens à ces petits et à nous faire rêver le temps d’un week-end ! Nous vous souhaitons une bonne année en espérant plus que jamais partager de nouveau ces moments complices en votre compagnie ! Prenez soin de vous et à très vite sur les pontons pour un briefing matinal ou un apéro collégial ! C’était juste une petite inspiration matinale.
Carine VERDIER Educatrice
Catherine nous rapporte : "Alors c'est bien vrai ce que tu disais, il existe des hommes gentils".
Sur la route…
« Et bien tu vois bien que tous les pères sont violents, nous en avons discuté dans la voiture et les deux autres filles ; Elles ont aussi un père qui boit, qui frappe sa femme et ses enfants. Les hommes c'est toujours comme ça !»
En tant qu’adulte, J’essaye alors d’argumenter pour tenter d’apporter un autre éclairage sur les hommes et explique qu’ils ne sont pas tous construits sur un même modèle.
Mais plus tard …j'observe la panique de mes jeunes lorsqu'elles constatent qu'un verre de vin blanc est offert aux adultes lors du pot d’accueil le vendredi soir. Elles me précisent à nouveau qu’un homme qui boit devient toujours violent.
Elles refusent alors catégoriquement de s'asseoir près du skipper…
Ensuite le WE se passe très bien, l’ambiance à bord petit à petit se détend, et au retour, dans la voiture, les filles me disent : "Alors c'est bien vrai ce que tu disais, il existe des hommes gentils".
(Extrait de conversations pendant les trajets lors d’un week-end Grand Largue)
Catherine DANIELOU
Lydie s'enthouiasme : ces navigations sont des bouts de vie, un réelle chance
Après un premier voyage d’une dizaine d’heure entre Strasbourg et Pornic, notre véhicule s’immobilise en haut d’une montée et nous nous retrouvons face à la mer comme pour un tête à tête. Et c’est la panique. Plusieurs jeunes refusent d’aller plus loin….c’est trop grand …la mer. Et voilà la première rencontre avec l’humilité de l’homme face à la nature. Plus tard, la soute du voilier qui nous accueille est rassurante, l’aspect confiné qui souvent est l’occasion de conflits , devient ici réconfortant, on se serre autour du carré pour un repas mérité.
Le lendemain, on y est, fiers de faire partie de cette belle flotte, sous les regards envieux de quelques promeneurs. Ouha ! c’est calme en mer, on sort de plus en plus, on interroge le « chef du bateau » et les plus curieux s’essaient à la navigation …. Admiration de ceux qui n’osent pas et inquiétude à la fois à savoir si le copain va assurer.
Et la fierté des quelques petits poissons péchés. Même ceux qui avaient promis de les remettre à l’eau gouteront leur première pêche et leur premier vrai poisson. Mettre le nez dans l’eau permet aussi de se rendre compte des déchets qui y flottent, c’est l’occasion de promesses.
Les 3 jours passeront, rapidement, les souvenirs restent et chaque retrouvaille physique ou par le biais de la messagerie rappellent des anecdotes que certains auraient aimé oublier, et des expériences de vie exceptionnelles à la rencontre d’une nature et de personnes passionnées qui ouvrent leurs bateaux, offrent leur passion à des jeunes qui sont surpris que l’ont puisse donner, sans avoir peur de se mettre en dette.
Quelle richesse ! en tant qu’éducateur ces expériences sont des bouts de vie, un réelle chance. Merci à grand largue et à ses supers bénévoles.
Lydie Miath, pas loin de 10 séjours, et j’y retourne dès que possible.
Merci pour eux
Sylvie nous explique : les week-end Grand Largue c’est croire en la capacité de surpassement des jeunes, de découverte et de dépassement d’eux-mêmes.
La Maison Jean Baptiste accueille et recueille des jeunes malmenés par la vie.
Ces enfants et adolescents, victimes du monde des adultes, « coupables » de leur placement ont bien du mal à comprendre, à recevoir et à accepter l’étayage temporaire que nous construisons autour d’eux, pour les conduire vers l’accomplissement d’eux-mêmes.
Le cadre institutionnel qui va les accompagner, les soutenir et tenter de les éduquer requiert des outils innovants par le biais desquels nous pourrons accomplir nos missions.
Beaucoup de jeunes confiés n’ont pas la possibilité de retours, et/ou d’allers et retours en famille, et leur vie se définit uniquement par un quotidien, une permanence dans l’établissement ou le groupe dans lequel ils sont contraints de vivre.
Marginalisés par leur histoire chaotique et douloureuse, stigmatisés dans les différents milieux dans lesquels ils évoluent (scolaires, sportifs…) ces enfants et adolescents rêvent et aspirent à une normalité de vie qui leur échappe.
Souffrant non seulement d’une fracture familiale, ils subissent un quotidien institutionnel qui participe parfois à un refus total ou partiel d’adhérer à la protection et à l’éducation que nous leur proposons.
C’est à cet endroit précis que le projet voile prend tout son sens.
Ces séjours répondent à une réflexion menée depuis quelques années, forts de nos observations, et constats des multiples bénéfices.
L’opportunité d’embarquement à bord de voiliers dans ce qu’elle représente en terme d’expérience personnelle, de découverte et d’enrichissements nous a conduit à croire en sa valeur éducative.Ces jeunes au parcours chaotique et complexe, embarqués dès leur plus jeune âge dans des tempêtes familiales, victimes et parfois coupables, devront à leur tour s’appliquer à devenir des adultes responsables, apprendre à tenir le cap de leur vie et naviguer vers l’accomplissement d’eux-mêmes, malgré les écueils rencontrés.
Vous l’aurez compris, tout s’appuie et se joue sur une seule et unique métaphore, celle de la mer.Quelle que soit la visée de nos objectifs éducatifs, leur offrir la possibilité d’une telle expérience à bord des bateaux, c’est leur affirmer notre croyance en leur capacité d’intégration et de transposition d’un moment extraordinaire dans un quotidien ordinaire.
En acceptant de vivre au rythme du voilier, de se soumettre à ses exigences, de croiser son existence avec un des éléments les plus puissant, de s’éprouver à la relation dans un espace restreint et instable, c’est croire en la capacité de surpassement des jeunes, de découverte et de dépassement d’eux-mêmes.
C’est croire en l’acquisition par l’expérimentation, entre autre, celle la plus redoutée, le mal de mer (mère ?). Expérience… :
Ils ont pour la plupart à éprouver et comprendre les sensations étranges que provoque le mal de mer. Leur corps si souvent blessé et malmené, exprime des sensations bizarres, non reconnaissables qu’ils doivent décoder et verbaliser pour les dépasser.
Ils ne peuvent fuir (quitter le bateau) et sont contraints de s’appuyer sur l’expérience et le « savoir » des adultes pour guérir ce mal momentané. Une fois cet état douloureux enrayé nous les entendons dire leur gratitude, ce qui est excessivement rare sur terre. Les liens se créent, se renforcent et ces adolescents retords et inaccessibles parfois découvrent bien malgré eux qu’ils n’ont eu d’autre choix que de lâcher prise, de se remettre entièrement à la bienveillance des adultes. La croyance en la parole de l’autre s’effleure, s’expérimente, et s’inscrit à ce moment là.
Les modes relationnels changent, plus d’agressivité, plus d’opposition, nous avons tous besoin les uns des autres sur un bateau. Chacun apprend à trouver sa juste place . Personne ne tente de monopoliser, de capter, tous comprennent ou sentent que c’est ensemble que nous parviendrons à avancer, à naviguer sous le bon vent, pour atteindre le port et s’amarrer…
L’individu est implicitement reconnu dans le groupe, il n’a plus à lutter contre l’autre, mais comprend là, qu’il doit faire avec l’autre, le danger potentiel n’est plus un Homme, mais la mer…
Les jeunes découvrent l’importance d’une conduite : sur un voilier chaque geste est précis, car s’il n’est pas opportun la sanction est immédiate ; cette sanction est toujours acceptée car elle n’est pas humaine… C’est le vent, la mer qui déterminent et imposent.
Ils découvrent les fondements de la solidarité, de l’entre-aide, du « faire avec » car seul, sans cohésion, sans le « faire ensemble » le bateau se fige, les voiles claquent dans le vent, tout s’affole, c’est la dérive assurée !
Ils s’éprouvent aux éléments, la pluie, le froid, et après avoir dépassé un moment houleux de navigation, découvre en retour la chaleur… au fond de leur bol de soupe ou de chocolat, cette chaleur humaine qui grâce aux soutiens du bout des yeux complices des marins qui les ont embarqué, leur ont donné malgré eux, la force du dépassement d’eux-mêmes et de leurs peurs.
C’est aussi au beau milieu des flots l’effet parfois enivrant du vent sur leur visage qui les amène à éprouver cette sensation de liberté subtile et fugace qui les autorise à rompre avec leurs propres amarres d’une vie écrasante et difficile…d’un quotidien dont on ne peut s’extraire… d’autres… avec lesquels on n’a pas choisi de partager le vivre ensemble.
C’est aussi réaliser et comprendre qu’ils ont été contraints de puiser au fond d’eux les ressources nécessaires pour affronter ce qu’ils pensaient impossible jusqu’alors, ressources méconnues d’eux-mêmes mais sur lesquelles ils pourront désormais s’appuyer…
Favoriser ces séjours, qu’ils soient de courte durée ou peut-être pourquoi pas beaucoup plus long, c’est souligner tout l’intérêt que nous portons à la situation de ces jeunes. Leur offrir la possibilité de vivre une telle aventure, c’est contribuer à l’accomplissement de nos missions, mais surtout, c’est contribuer, à votre façon, à faire naître un espoir.
Sylvie Comte
Jacky LEHRY nous dit : Grand Largue est une rencontre des jeunes avec des hommes et des femmes marins.
Grand Largue est pour les terriens d’Alsace que nous sommes, synonyme d’Horizons, de Vent , ..de Liberté !
Les jeunes quittent la terre ferme pour la houle, le roulis, les vagues, les marées, les voiliers, avec au Cœur une sorte d’appréhension sourde. (bien cachée) face à l’Océan.
Et puis il y a les marins avec leur langage à eux, il parlent de bouts, de winch, de bôme, de drisse, d’empannage, crient "à bâbord toute, cap sur le 230 !".
Les équipages de jeunes matelots néophytes sont alors vraiment ailleurs, il n’y a plus d’autre possibilité que de faire confiance à ceux qui savent,
D’apprendre, d’écouter, de sentir, d’accepter.
Et puis sorti du port, l’étrave vers le large, le skipper confie la barre aux jeunes tour à tour, il reste derrière eux , les guide, les rassure et leur permet à ce moment- là d’être soudainement fiers, d’être pleinement eux-mêmes !
Grand Largue est une rencontre inédite, improbable, entre des jeunes et l’océan, des jeunes et la voile, mais surtout des jeunes avec des hommes et des femmes marins.
Le tout dans un espace dépoussiéré des habitudes, déparasité du quotidien.
Pour les jeunes c’est une expérience qui marque durablement les esprits, à leur retour on les entend parler comme d’authentiques aventuriers des grandes traversées, à leur copains , leur famille et tout au fond à eux mêmes se remémorant une rencontre heureuse et insolite.
LEHRY Jacky.
Marie-Jeanne témoigne avec conviction : Grand Largue c’est la rigueur et la chaleur
Chouette un week-end « Grand Largue » !
Qu’est-ce que c’est ?
D’abord, il faut convaincre, le Chef de Service ou la hiérarchie, de notre projet. Ensuite, si le « vent » est bon, informer les jeunes de l’opportunité de vivre un week-end à la mer, sur un voilier. Il est important que les jeunes soient volontaires et s’impliquent dans ce projet.
L’organisation Grand Largue propose 9 lieux d’accueil, 9 ports sur la côte ouest. Quels seront les critères de choix ? Cela appartient à l’équipe éducative selon la distance, les dates proposées, la découverte d’un site particulier, la participation des années précédentes… Puis, il faut s’inscrire dès l’ouverture du site, car les demandes sont nombreuses.
Ensuite, il faut contacter le skipper, seulement quand nous sommes informés sur quel bateau nous serons. Ce premier échange est important, pour créer le début d’une relation qui s’annonce intense durant l’aventure.
Préparer le week-end, c’est rassembler dans un sac ses effets personnels, toilette, vêtements chauds, duvet. Puis, penser à « l’avitaillement », terme marin pour exprimer les vivres, victuailles, nourriture, pour deux petits déjeuners, deux déjeuners, un dîner pour le nombre de personnes sur le voilier : les jeunes, l’éducateur, les skipper et co skipper. Faire preuve d’originalité dans les menus n’est pas exclu. Il est bon d’associer les jeunes à ces préparatifs autant que possible.
Le jour « J » arrive. Certains jeunes sont angoissés du changement de lieu de vie, par l’inconnu… Dormir sur un bateau, comment ça se passe ?
A terre, dès l’arrivée au port, de nombreux adultes sont là, autour du pot d’accueil puis au moment des briefings… Les jeunes sont très entourés. Voilà des personnes, toutes bénévoles, sauf leurs éducateurs, à leur disposition, pour agrémenter le week-end, et c’est autant de possibilités d’échanges, de repères. Chacun est heureux d’être là, de participer, de donner du plaisir à ces jeunes, en souffrances familiales.
Naviguer c’est l’inconnu pour nombre de jeunes et même des éducateurs.
C’est obéir au skipper et son co skipper. C’est se retrouver dans un espace exigu. Nos jeunes sont parfois gênés par trop de proximité. A la fois, c’est sécurisant ce voilier « contenant et protecteur » sur la mer. A la fois, c’est angoissant quand il est secoué par les vagues, quand il gîte, plus ou moins, selon la météo bien sûr.
Le vocabulaire des marins est très spécifique. C’est au Skipper de confier quelques tâches de navigation aux jeunes. Quelle fierté, alors, de barrer le voilier en respectant les consignes, de réaliser d’autres manœuvres !
Nos jeunes, souvent allergiques aux contraintes, aux règles, sont dans un environnement ou la mer, la météo, le skipper, fixent le cadre indispensable à la sécurité de tous. Ils prennent conscience des responsabilités de chacun pour la bonne organisation de ce week-end / cadeau.
Grand Largue c’est la rigueur et la chaleur :
- Rigueur pour la sécurité à terre, en mer, à tous les moments partagés.
- Chaleur, convivialité, humour : les responsables et tous les participants ont à cœur de veiller au bien-être des jeunes.
Si des tensions apparaissent entre jeunes ou avec des adultes, le RO, responsable d’opération, est réactif dans l’instant. Les décisions sont prises, sans tarder, pour la sécurité de tous.
Ce week-end laisse des souvenirs exceptionnels aux jeunes ainsi qu’à tous les adultes participant à l’opération. Tous ces moments partagés sont intenses et augmentés lors de la fête du samedi qui réunit tous les équipages, parfois la SNSM, la gendarmerie maritime, les responsables du port… Les animations chantées, dansées, en scènètes ou autres, selon la créativité des jeunes, des éducateurs... laissent des émotions fabuleuses. Merci à tous les animateurs improvisés qui nous ont surpris sur certaines opérations. L'imagination est décuplée quand le cadre est favorable à l'inventivité.
Que d’adultes présents sur ce week-end : que de références identitaires possibles pour ces jeunes trop souvent déçus par les adultes, ayant perdu confiance en eux et dans la vie.
Les week-ends Grand Largue « nourrissent » nos jeunes sur un plan humain, relationnel, moral, technique, maritime, culturel... Plusieurs années après, ils ont des anecdotes à raconter. Certains ont la chance de vivre plusieurs week-ends avec Grand Largue.
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